Et si des personnes âgées sans descendance donnaient leur maison?

Le contexte économique du Québec n’a jamais été aussi sombre.

En pleine crise du logement, exacerbée par des politiques publiques (et municipales) ouvertement hostiles aux jeunes Québécois qui rêvent d’avoir une maison, on se retrouve, individuellement et collectivement, avec des défis de société qui pourraient mener à une détérioration importante du tissu social, basé historiquement sur nos solidarités intergénérationnelles.

Nul besoin de feindre l’ignorance de ce phénomène. Il a lieu, sous nos yeux et des millions de Québécois à loyer, par obligation, sombrent inlassablement dans le désespoir et la misère financière pour enrichir des propriétaires de logements qui, trop souvent, marquent l’imaginaire (et le portefeuille) de leurs locataires par leur rare-avarice… et leur relative inhumanité.

Autrement dit, le « village », au Québec, est… brisé.

Et aucune mesurette de pacotille ne peut changer le cours de l’effondrement sociétal qui menace le Québec et surtout, ses plus jeunes qui s’épuisent à cumuler les emplois (insuffisamment payés) pour boucler leur budget, dans le contexte scandaleux des hausses de loyers à répétition et sans fin.

Plusieurs personnes plus âgées remarquent ce qui se passe.

Et certaines de ces personnes, conscientes de leur rôle en société, se demandent comment ils pourraient disposer de manière intelligente de leur maison (ou condo, ou autre) au moment de leur mort.

Dans cet article, vous comprendrez comment une succession s’avère être un véhicule de choix pour « donner » une maison, au moment de la mort du précédent propriétaire qui aurait fait inscrire cette volonté, via sa succession.

Socialement, ce geste de grande générosité intergénérationnelle pourrait avoir pour effet de sauver le Québec, tel que nous l’avions précédemment rêvé.

Une dernière chance pour les jeunes Québécois, pour ainsi dire, via une synergie engageante avec des personnes âgées qui, au moment de leur départ, auront planté un espoir inespéré dans le coeur de ceux qui leur succéderont, en tant que nouveaux propriétaires.

Concrètement, comment donner?

Au Québec, un propriétaire peut techniquement donner sa maison à une autre personne mais cela n’est pas exempt de conséquences fiscales, tant pour le donateur que pour le bénéficiaire.

Voici une explication claire et concise, voire un guide vers la réussite d’un tel projet:

Pour le propriétaire (donateur):

  • Impôt sur le gain en capital: Même si la maison est donnée (sans vente), Revenu Québec et l’Agence du revenu du Canada (ARC) considèrent cela comme une « disposition » au sens fiscal. Le donateur doit calculer la différence entre la valeur marchande actuelle de la maison et son prix d’achat initial (coût de base rajusté). Si la maison a pris de la valeur, il pourrait devoir payer un impôt sur ce gain en capital, même sans recevoir d’argent.
    • Exception: Si c’est la résidence principale, le gain peut être exempté grâce à l’exemption pour résidence principale, mais cela doit être déclaré correctement.
  • Don à un conjoint ou à un enfant mineur: Dans certains cas (comme un transfert à un conjoint), il peut y avoir un « roulement fiscal », où le gain en capital est reporté. Cependant, des règles spécifiques s’appliquent, et une consultation avec un fiscaliste est recommandée.

Pour le bénéficiaire:

  • Pas d’impôt immédiat: En général, recevoir un bien en cadeau n’entraîne pas d’impôt sur le revenu pour le bénéficiaire au moment du don. Cependant, si le bénéficiaire vend la maison plus tard, il devra payer un impôt sur le gain en capital basé sur la valeur marchande au moment du don (et non sur le prix d’achat initial du donateur).
  • Frais de transfert: Au Québec, le bénéficiaire pourrait devoir payer des droits de mutation immobilière (« taxe de bienvenue ») à la municipalité, sauf dans certains cas d’exemption (par exemple, entre conjoints ou parents proches, sous conditions).

Autres considérations:

  • Preuve de don: Le transfert doit être officialisé par un notaire, et il faut démontrer qu’il s’agit d’un don sans contrepartie pour éviter que l’ARC ou Revenu Québec ne le requalifie en vente déguisée.
  • Planification successorale: Si l’objectif est de transmettre un bien sans impôt immédiat, il peut être plus avantageux d’attendre un décès, car les héritages ne sont pas imposables au Canada (bien que le gain en capital soit calculé dans la succession).

En résumé, donner une maison sans conséquences fiscales est rare et dépend de la situation (résidence principale, lien familial, valeur du bien). Pour éviter des surprises, il est fortement conseillé de consulter un notaire ou un fiscaliste spécialisé au Québec.

La succession: une lueur d’espoir pour les Québécois sans maison

Au Québec, posséder une maison est devenu un rêve hors de portée pour une grande partie des jeunes adultes et de la classe moyenne. Les prix de l’immobilier ont explosé, les salaires stagnent, et l’accès au marché semble réservé à une élite financièrement favorisée.

Dans ce contexte, les successions pourraient représenter une des rares avenues réalistes pour des millions de Québécois qui souhaitent un jour devenir propriétaires.

Mais quels sont les avantages concrets pour le propriétaire qui choisit de transmettre sa maison par succession, et pour celui ou celle qui la reçoit ? Examinons cela de plus près.

Avantages pour le propriétaire: simplicité et héritage maîtrisé

Pour un propriétaire de maison, planifier la transmission de son bien via une succession offre plusieurs bénéfices, tant sur le plan fiscal que personnel, soit:

  1. Pas d’impôt immédiat sur le gain en capital: Contrairement à un don de son vivant, où le propriétaire doit déclarer une « disposition » et potentiellement payer un impôt sur le gain en capital (sauf exemption pour résidence principale), le décès reporte cette responsabilité. Au moment de la mort, le bien est évalué à sa valeur marchande, mais le propriétaire lui-même n’a pas à débourser quoi que ce soit – c’est la succession qui gère cette étape.
  2. Contrôle jusqu’à la fin: En optant pour une succession plutôt qu’un don immédiat, le propriétaire conserve l’usage de sa maison jusqu’à son décès. Cela lui permet de continuer à y vivre ou d’en tirer des revenus (par exemple, via une location), tout en s’assurant que le bien ira à la personne de son choix après son départ.
  3. Héritage équitable et planifié: Avec un testament bien rédigé, le propriétaire peut désigner précisément qui recevra la maison – un enfant, un neveu, ou même une personne sans lien familial. Cela évite les conflits entre héritiers et garantit que son souhait est respecté, tout en offrant une solution tangible à un proche qui n’aurait jamais pu acheter une maison autrement.

Avantages pour le bénéficiaire: un accès rare à la propriété

Pour le bénéficiaire nommé dans la succession, recevoir une maison peut changer la donne dans un marché immobilier quasi inaccessible :

  1. Aucun impôt sur l’héritage: Contrairement à d’autres pays, le Canada n’impose pas de taxe directe sur les héritages. Le bénéficiaire reçoit la maison sans avoir à payer d’impôt sur sa valeur au moment du décès. Si le défunt devait un impôt sur le gain en capital, cela est réglé par la succession avant la transmission, pas par le bénéficiaire.
  2. Un tremplin économique: Pour un jeune adulte ou un membre de la classe moyenne, hériter d’une maison représente bien plus qu’un toit. C’est un actif qui peut être utilisé comme levier financier : vivre sans hypothèque, louer une partie pour générer des revenus, ou même vendre le bien pour financer d’autres projets. Dans un Québec où l’endettement hypothécaire étouffe des générations, cet avantage est colossal.
  3. Une valeur marchande avantageuse: La maison est transférée à sa valeur marchande au moment du décès. Si le bénéficiaire décide de la vendre plus tard, l’impôt sur le gain en capital ne s’appliquera qu’à la plus-value réalisée après ce point, et non sur l’entièreté de l’appréciation depuis l’achat initial par le défunt.

Une solution réaliste dans un marché en crise

Alors que les prix des maisons au Québec continuent de grimper – dépassant souvent le million de dollars dans les grands centres comme Montréal – les successions pourraient devenir une bouée de sauvetage pour des millions de Québécois.

Pour les propriétaires, c’est une manière de transmettre un patrimoine sans les tracas fiscaux immédiats d’un don de leur vivant.

Pour les bénéficiaires, c’est une chance unique d’accéder à la propriété dans un système où épargner pour une mise de fonds relève de l’exploit.

Cependant, cette avenue n’est pas sans défis.

Les propriétaires doivent planifier leur succession avec soin, idéalement avec l’aide d’un notaire, pour éviter des complications légales ou fiscales pour leurs héritiers.

De plus, tous les Québécois n’ont pas un parent ou un proche en mesure de leur léguer une maison. Malgré ces limites, dans un paysage immobilier aussi déséquilibré, la succession demeure une des rares lueurs d’espoir pour rééquilibrer les chances et redonner vie au rêve de la propriété.

Avant le dernier souffle

La structure sociale actuelle divise.

Les enfants en service de garde (incluant des bébés), les enfants en milieu scolaire, les jeunes adultes dans des emplois sans issue, les adultes qui hésitent à lancer leur propre famille ou encore, ceux qui ont déjà un ou plusieurs enfants et qui en arrachent, les séniors qui ont un petit coussin et de l’expérience professionnelle mais qui savent que là, c’est la santé qui peut jouer des tours et les personnes du 3e âge qui se retrouvent en RPA ou en CHSLD.

Donc: de la division, partout.

Les synergies historiques entre les générations doivent être rebâties parce qu’elles ont bel et bien été détruites, avec tout le monde dans sa petite « cage à poule » et peu de réelles interactions riches, entre les plus jeunes et les plus vieux.

À mon sens, ça prend un effort collectif.

Et le fait d’avoir une maison est encore fondamental pour espérer pouvoir fonder un foyer aussi stable et efficace que possible. Même si le rêve n’est plus qu’un rêve, il faut se donner les moyens de passer outre les limitations du modèle social individualiste actuel.

D’où l’idée, pour une personne plus âgée qui se sait en fin de vie, de donner sa maison à un propriétaire plus jeune qui pourrait la reprendre (via une succession, en bonne et due forme) mais pas l’acheter.

La logique veut qu’une fois de l’autre côté du voile de la passation vers l’outre-monde, les possessions matérielles n’ont plus d’importance. Cette idée n’est pas applicable pour ceux qui ont déjà une descendance nommée par voie de testament, bien évidemment mais comme il y aurait des centaines de milliers de personne âgées sans descendance ou famille (identifiée ou connue), l’approche du don via la succession, pour une maison, pourrait ouvrir une toute nouvelle avenue de solidarité intergénérationnelle.

Socialement, c’est à chacun de nous d’user de créativité parce qu’on l’a vu, fois après fois, ce ne sont pas les politiques publiques qui vont aider à l’accession à la propriété. Les gouvernements taxent et favorisent les lobbys-du-gros-cash alors c’est entre nous qu’il faut trouver des solutions.

Par exemple, si une personne âgée donne sa maison, en succession, à un jeune couple de Québécois, ceux-ci seraient peut-être ravis d’intégrer cette personne à leur réalité et du coup, ça pourrait contribuer à resserrer des liens qui, autrement, n’auraient pas pu advenir.

Et hypothétiquement, si ce jeune couple pouvait emménager avec la mort de l’actuel propriétaire, ceux-ci pourraient compenser avec un loyer et des soins courants pour la personne âgée qui en a besoin. Du moment que tout est officialisé devant un notaire (ou autrement, advenant), ce serait-là une approche gagnante pour tous.

Plus il y aura de tels arrangements et plus nos solidarités sociales seront fortes… et fonctionnelles.

Les villes et villages revivront, les personnes âgées ne seront plus seules, la pression sur la demande pour des logements baissera, graduellement (avec les baisses de prix qu’il serait alors nécessaire d’appliquer, pour demeurer cohérents avec la demande en baisse) et ça faciliterait une détente sur l’économie et le terrible phénomène de l’inflation (le vol invisible de vos fonds, en devises fiat).

Pour vous ou pas?

Comme je l’ai spécifié, ce n’est pas pour tout le monde.

Mais…

Si de plus en plus de ces arrangements successoraux adviennent, les maisons demeureront des lieux de potentiels infinis pour les occupants du Québec qui s’en serviront pour bâtir un monde de nouvelles solidarités… et d’humanités.

Parce qu’on va se le dire, le « système » actuel est largement inhumain.

Alors si on veut cultiver l’humanité, c’est à nous de semer en conséquence et en conscience de ces facteurs.

Claude Gélinas

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